Publication de la sentence dans l’arbitrage concernant l’affaire RU - Lançon (l'Union européenne c. le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord)

Dans l’arbitrage institué dans le cadre de l’Accord de commerce et de coopération entre l’Union européenne et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord concernant la décision du Royaume-Uni, en vigueur depuis le 26 mars 2024, d’interdire la pêche du lançon dans les eaux anglaises de la mer du Nord et dans toutes les eaux écossaises, une sentence a été publiée sur le site de la Cour permanente d’arbitrage (« CPA »). La CPA a agi en tant que greffe dans le cadre de cette affaire.
Le Tribunal arbitral a rendu sa sentence le 28 avril 2025. Conformément à l’Ordonnance de procédure n°1, chaque Partie a eu un délai de sept jours, avant la publication de la sentence, pour examiner si certaines parties de ladite sentence doivent être désignées comme contenant des « informations confidentielles ». Les Parties ont eu un délai de quatorze jours pour soumettre une version commune expurgée de la sentence.
L’arbitrage a été institué le 25 octobre 2024 lorsque l’Union européenne a adressé au Royaume-Uni une demande de constitution d’un tribunal arbitral en vertu de l’article (739) de l’Accord de commerce et de coopération. L’arbitrage porte sur les allégations de l’Union européenne, telles que décrites dans ses observations écrites déposées le 9 décembre 2024, selon lesquelles :
i. l’interdiction de la pêche du lançon est incompatible avec les obligations du Royaume-Uni au titre de l’article (496), paragraphes (1) et (2), de l’Accord de commerce et de coopération, lu conjointement avec l’article (494), paragraphe (3), point (c), de l’Accord de commerce et de coopération, parce qu’elle n’est pas « fondée » sur les « meilleurs avis scientifiques disponibles » ;
ii. l’interdiction de la pêche du lançon est incompatible avec les obligations du Royaume-Uni au titre de l’article (496), paragraphes (1) et (2), de l’Accord de commerce et de coopération, lu conjointement avec l’article (494), paragraphe (3), point (f), de l’Accord de commerce et de coopération, parce qu’il n’a pas été tenu compte du principe selon lequel de telles mesures doivent être proportionnées et non discriminatoires ; et
iii. dans la mesure où le Royaume-Uni a appliqué une mesure de gestion des pêches qui est incompatible avec l’article (496) de l’Accord de commerce et de coopération, lu conjointement avec l’article (494) de l’Accord de commerce et de coopération, le Royaume-Uni a donc commis une violation grave de son obligation d’accorder plein accès à ses eaux pour la pêche conformément à l’article (2), paragraphe (1), point (a), de l’annexe 38 de l’Accord de commerce et de coopération, parce que la limitation des droits garantis par cette disposition n’est pas justifiée ou justifiable.
Dans ses observations écrites déposées le 9 janvier 2025, le Royaume-Uni a demandé au Tribunal arbitral de rejeter chacune des trois allégations de l’Union européenne au motif que la décision d’interdire la pêche du lançon dans les eaux anglaises de la mer du Nord et dans toutes les eaux écossaises ne violait aucun aspect de l’Accord de commerce et de coopération.
Suite au dépôt de communications écrites par les Parties, une audience a eu lieu du 28 au 30 janvier 2025 au Palais de la Paix, à La Haye. Les communications écrites des Parties, ainsi que les comptes-rendus et photos de l’audience, sont accessibles au public sur le site de la CPA (https://pca-cpa.org/en/cases/334/).
Conformément à l’article 745 de l’Accord de commerce et de coopération, le Tribunal arbitral a remis un rapport intérimaire le 27 mars 2025. Le 10 avril 2025, chaque Partie a présenté une demande écrite au Tribunal arbitral pour revoir des aspects précis du rapport intérimaire. Les 15 et 16 avril 2025, chaque Partie a formulé des commentaires sur la demande de l’autre Partie, respectivement.
Dans sa sentence du 28 avril 2025, le Tribunal arbitral, à l’unanimité :
i. REJETTE l’allégation selon laquelle l’interdiction de la pêche du lançon dans les eaux du Royaume-Uni est incompatible avec les obligations du Royaume-Uni au titre de l’article (496), paragraphes (1) et (2), de l’Accord de commerce et de coopération, lu conjointement avec l’article (494), paragraphe (3), point (c), de l’Accord de commerce et de coopération, notamment l’allégation selon laquelle elle n’était pas fondée sur les meilleurs avis scientifiques disponibles ;
ii. DÉCLARE que l’interdiction de la pêche du lançon dans les eaux anglaises est incompatible avec les obligations du Royaume-Uni en vertu de l’article (496), paragraphe (1), de l’Accord de commerce et de coopération, lu conjointement avec l’article (494), paragraphe (3), point (f), de l’Accord de commerce et de coopération, vu le non-respect du principe de la mise en œuvre de mesures proportionnées ;
iii. REJETTE l’allégation selon laquelle l’interdiction de la pêche du lançon dans les eaux écossaises est incompatible avec les obligations incombant au Royaume-Uni en vertu de l’article 496, paragraphe 1, de l’Accord de commerce et de coopération, lu conjointement avec l’article (494), paragraphe (3), point (f), de l’Accord de commerce et de coopération, notamment l’allégation selon laquelle le principe de la mise en œuvre de mesures proportionnées n’a pas été pris en compte ;
iv. REJETTE l’allégation selon laquelle l’interdiction de la pêche du lançon est incompatible avec les obligations du Royaume-Uni au titre de l’article 496, paragraphe 1, de l’Accord de commerce et de coopération, lu conjointement avec l’article (494), paragraphe (3), point (f), de l’Accord de commerce et de coopération, notamment l’allégation selon laquelle le principe de la mise en œuvre de mesures non-discriminatoires n’a pas été pris en compte ;
v. DÉCIDE, suite à la décision évoquée au point (ii) ci-dessus, que le Royaume-Uni a manqué à son obligation d’accorder le plein accès à ses eaux pour la pêche du lançon, conformément à l’article (2), paragraphe (1), point (a), de l’annexe 38 de l’Accord de commerce et de coopération.
En conséquence, le Tribunal arbitral :
DÉCIDE que le Royaume-Uni est tenu de prendre les mesures nécessaires pour se conformer à la décision du Tribunal arbitral énoncée aux sous-paragraphes (747), (ii) et (v) ci-dessus, afin de respecter les dispositions concernées.
Composé de trois membres, le Tribunal était présidé par Dr. Penelope Ridings, MNZM (une ressortissante de la Nouvelle-Zélande). Les autres membres du Tribunal étaient Prof. Hélène Ruiz Fabri (France) et l’honorable juge David Unterhalter (Afrique du Sud).
De plus amples informations relatives à la procédure sont disponibles sur le site Internet de la CPA à l’adresse suivante : https://pca-cpa.org/en/cases/334/.